dimanche 11 décembre 2011

Chronique n°10 : Mais Théo, quel temps fera-t-il ?

Chers lectrices, chers lecteurs,
« Avez-vous le temps ? »
Cette question à double sens est trompeuse. Le temps oui, mais lequel ? Pompon et Momo étaient pressés d’arriver et l'ont utilisé au mieux, c'est-à-dire au minimum. Mais ils étaient tout autant, comme les terriens, curieux de connaître le temps à venir. Et ce temps là, n'est ni long ni court, il est beau ou mauvais, changeant ou stable, humide ou sec, clair ou sombre, que sais-je encore ?
Vous comprenez que ce n’est pas simple à expliquer , merci de nous accorder un peu de votre temps pour cela.
« Mais Théo quel temps fera-t-il ? »
Pas facile de répondre, depuis la nuit des temps, nous cherchons à deviner ce qui arrivera demain. Nous tentons de savoir si le temps qu’il fera, dans les prochaines heures ou les jours à venir, est compatible avec notre activité projetée. Il y a plusieurs méthodes pour y parvenir et cela avec plus ou moins de réussite.
« Je te l’avais bien dit ! »
Les dictons marins ont la réputation de traduire les observations pour formuler des prévisions météorologiques de façon mnémotechnique (dont on se souvient facilement). Ces dictons ont  toujours raison (ou presque) puisqu’il en existe pour toutes les situations, toutes les interprétations et leurs contraires. L’importance de l’observation de l’environnement est aussi à souligner : l’aspect des nuages, le vol des oiseaux, le bruit du vent, le changement de température et l’humidité qui fait grogner les genoux du grand-père, sont autant de signes avant-coureurs pour celui qui sait.
Nos anciens qui savaient, ont formulé de savoureux et très nombreux dictons et parmi ceux-ci nous avons extrait :
« Barbe de chat aux nuages,
amène vents de grand tapage. »
et encore,
«Oiseaux de mer réfugiés à terre,
tempête va venir de forte manière. »
Bravo ! Le dicton et son rapporteur ne se trompent qu’une fois sur deux, et ça, on vous l’avait bien dit !
« C’est pas sérieux tout ça. »
Ne ricanons pas trop vite, ces observations et la critique des prévisions parfois hasardeuses sont, il faut le reconnaître, la base d’ébauches de lois physiques d’une science encore imparfaite, néanmoins très sérieuse et très complexe qui progresse de jour en jour : la Météorologie.
« La météo, qu’est-ce ? »
Près des côtes, la radio porte à Momo et Pompon les informations concernant la situation et l’évolution du régime des vents (vitesse et direction, état de la mer…). En haute mer, là où la (Ouh-la-la !) radio ne porte plus, nos navigateurs reçoivent sur leur ordinateur, via les satellites, des cartes météorologiques qui traduisent graphiquement l’évolution, la force et l’orientation du vent, ce qui leur permet d’adapter leur trajectoire et la voilure de leur navire aux circonstances.
Carte des vents

Carte des pressions atmosphériques

« Il est trop fort ce Beaufort. »
Il ne s’agit pas ici d’apprécier la qualité du fromage de Beaufort, mais plutôt d’évoquer l’Amiral britannique Francis Beaufort qui inventa, dès 1805, un code d’évaluation du vent et des vagues. Ce code est nommé « Échelle de Beaufort ». L’échelon le plus faible est nommé Force 0 (vitesse du vent 1 nœud, mer d’huile), puis Force 1,2,3 jusqu’au plus élevé, Force 12 (ouragan, vitesse du vent 64 nœuds et plus) en passant par la Force 4 qui a notre préférence poétique : jolie brise de 11 à 16 nœuds et nombreux moutons.
Échelle de Beaufort

Force
Appellation
Vitesse du vent
État de la mer
Effets à terre
Nœud
km/h
0
calme
1
1
Mer d'huile, miroir
La fumée monte droit
1
très légère brise
1 à 3
1 à 5
Mer ridée
La fumée indique la direction du vent
2
légère brise
4 à 6
6 à 11
Vaguelettes
On sent le vent au visage
3
petite brise
7 à 10
12 à 19
Petits moutons
Les drapeaux flottent
4
jolie brise
11 à 16
20 à 28
Nombreux moutons
Le sable s'envole
5
bonne brise
17 à 21
29 à 38
Vagues, embruns
Les branches des pins s'agitent
6
vent frais
22 à 27
39 à 49
Lames, crêtes d'écume étendues
Les fils électriques sifflent
7
grand frais
28 à 33
50 à 61
Lames déferlantes
On peine à marcher contre le vent
8
coup de vent
34 à 40
62 à 74
Les crêtes des vagues partent en tourbillon d'écume
On ne marche plus contre le vent
9
fort coup de vent
41 à 47
75 à 88
10
tempête
48 à 55
89 à 102
Les embruns obscurcissent la vue, on ne voit plus rien
Risque de chute pour
 les piétons
11
violente tempête
56 à 63
103 à 117
12
ouragan
64 et plus
118 et plus


« Mais à quoi, cela sert-il ? »
Cette grille sert à analyser une situation, de sorte que Pompon, Momo et tous ceux qui savent ce que signifie « dépression centrée à 15 miles au sud de l’Irlande se déplaçant en se creusant vers l’Écosse, vent de sud de force 7 » soient en capacité de modifier (ou non) leur parcours.
Ne soyez pas impatients, chaque chose en son temps, nous parlerons, si vous le voulez bien, dans une prochaine chronique des termes techniques comme « nœud, mille nautique, etc.»
« Tout ça, c’est du vent ».
Ce n’est pas parce que vous n’avez pas tort, que nous pouvons nous permettre de vous donner raison ! Allons, gardez courage ! Vous avez bien suivi jusqu’ici, nous allons tenter d’être clairs pour le sujet suivant.
L’air qui entoure notre planète n’est pas homogène, ses caractéristiques évoluent avec le temps, le lieu, l’altitude et de très nombreux facteurs. Parmi ceux-ci, la pression atmosphérique et l’humidité.Imaginez que l'air se répartit autour du globe selon sa pression avec des pics (montagnes) et des creux (fosses). Les pics sont les anticyclones (zones de hautes pressions) et les creux sont les dépressions (zones de basses pressions).
« ça n'a l’air de rien ».
Justement ! L’air qui est en haut de l’anticyclone dévale la pente vers le fond de la dépression, mais il ne peut pas descendre selon la plus grande pente car la terre tourne sur elle-même. Cet air en mouvement que nous nommons le vent est dévié selon le schéma ci-après dans l’hémisphère nord.

« c’est pas sorcier. »
Vous avez raison d’être attentifs, vous avez compris l’essentiel et vous dites légitimement et fièrement : « c’est pas sorcier ».
Et pourtant si !
Depuis la "Marine en bois", le baromètre est appelé « le sorcier », pourquoi ? Cet appareil inventé au XVIIème siècle et amélioré au fil du temps par plusieurs savants (Torricelli, Pascal entre autres) mesure la pression de l’atmosphère (poids de la couche d’air). Cet appareil obligatoire à bord de tous les navires, sur toutes les mers du globe, annonce les changements de temps. En témoignant du déplacement d’une dépression, le baromètre prédit le vent : c’est un vrai « sorcier ». A titre d'exemple, lorsque le baromètre indique une baisse de 6 hectopascals en 3 heures il faut s’attendre à un vent de force 6 Beaufort.





« ça décoiffe, hein ? »

Aujourd’hui, les prévisions météorologiques sont élaborées par des sociétés ou organismes spécialisés qui collectent et analysent les données recueillies dans le monde entier. On trouve des stations météorologiques de toutes nationalités, sur tous les continents, et aussi sur des bateaux, des balises flottantes, des sondes aériennes et à bord de satellites !
 Ballon-sonde
 Station météo
Localisation des bouées météorologiques en périphérie de la France

A titre d'exercice, nous vous proposons d'ouvrir un atlas à la recherche des îles Crozet, Kerguelen, Saint-Paul et Amsterdam (cherchez bien, elles sont toutes petites !). Ces îles, au milieu de l’Océan Indien, en territoire français, abritent des stations météorologiques qui transmettent inlassablement leurs informations.
Îles Kerguelen - Port aux Français
Île Crozet - Base Alfred Faure

Très utiles dans toutes les activités humaines, les prévisions météorologiques sont incontournables pour la sécurité des marins.

Cette présentation (trop) simple de la météo a peut être suscité en vous des questions, réflexions, critiques et autres observations. Faites-les nous partager par un courriel à :

Nous vous répondrons bien volontiers.
Ber et Ber.



lundi 28 novembre 2011

Chronique n° 9 - Histoires de mer

Chères lectrices, chers lecteurs,
La très intéressante et instructive rubrique publiée courant octobre est intitulée « Carnet de Voyage à Madère par Pompon ». Mais qu’est ce qu’un carnet de voyage ? Voici des éléments de réponse :
Aimez-vous les histoires de mer ?
Depuis toujours les marins, comme les terriens, de retour à la maison ont su captiver leur auditoire par leurs récits en choisissant la bonne manière, la bonne expression.
Nous vous proposons d’évoquer les plus courantes :
La tradition orale.
Sur tous les continents, les histoires du passé sont répétées de génération en génération par le grand-père ou la grand-mère aux petits enfants qui les transmettront à leur tour lorsqu’ils seront grands.
En Afrique par exemple la tradition orale reste vivace, il y a même des personnages qui gardent une grande importance, car ils sont les gardiens des histoires réelles ou inventées. Ils sont appelés les" griots".
Cette méthode orale a ses limites et nous perdons, avec le temps qui passe, la mémoire de certaines civilisations pourtant brillantes autrefois. Nous pouvons regretter l’oubli des histoires, mais la perte des connaissances liées à ces périodes est bien plus préoccupante, par exemple : les savoirs et savoir-faire des Indiens d’Amérique du Nord et du Sud et aussi malheureusement ceux des populations qui possédaient déjà l'art de la navigation et qui ont occupé les iles dispersées dans l’immensité de l’Océan Pacifique.
Quel dommage !
« Les paroles s’envolent mais les écrits restent ».
L’écriture permet de fixer les histoires. Enfin d’une certaine façon, car l’écrivain offre sa vision, sa vérité, alors que le lecteur lui, interprète à sa manière qui peut être fidèle ou poétique, mais elle peut aussi être éloignée de l’intention de l’auteur.
Les plus beaux textes ouvrent au rêve, à l’imagination, à l’interprétation… D’ailleurs le conteur, commence souvent par :
« Il était une fois...» ou « En ce temps là... »
L’un des plus vieux textes, qui rapporte une aventure humaine extraordinaire, a été écrit par un poète à l’imagination féconde il y a près de 3000 ans. C’est le fameux poète Homère qui écrivit l’Odyssée, le voyage initiatique d’Ulysse sur la mer Méditerranée et ses rencontres incroyables mêlant personnages étonnants et dieux de la mythologie grecque !
Et oui, ce talentueux conteur, continue à nous « mener en bateau » !
La tradition du Récit de Voyage.
Celui qui a vu, raconte à son retour pour l’émerveillement de ceux qui sont curieux et attentifs à ses récits. Il fait un Récit de Voyage, un genre littéraire qui connaitra un grand succès. Certains de ces récits ont rendu célèbres les héros de ces ouvrages. Nous avons choisi de vous parler de deux d’entre eux :
« Le devisement ou description du monde » raconte le très long et très lointain voyage du marchand vénitien Marco Polo jusqu’en Chine, en empruntant la fameuse Route de la Soie. A son retour, il dicta son récit de voyage à un compagnon dans une prison de Pise où son chemin aventureux l'avait conduit !
« Les aventures d’Hadji Baba » et « Les contes des mille et une nuits ». L’exagération, le rythme de la narration et le talent de l’écrivain nous emportent avec lui dans un fabuleux voyage.




La nécessité du Journal de Bord.
Il y a aussi un autre genre littéraire qui relate les missions maritimes réussies ou non des courageux navigateurs, de retour au port d’attache. Les chefs d’expéditions doivent "rendre des comptes" ce qui est bien différent de raconter ! Et pour cela le capitaine rédige un journal de bord qui sera le support de son rapport à l’autorité qui l’a missionné. Le journal de bord est à l’origine (et encore aujourd’hui) un document technique obligatoire pour la sécurité des marins. Il recueille les données utiles à une estimation de la position du navire, avec le plus d’exactitude possible, sur cette mer immense et dangereuse.
Ces journaux furent d’abord lus par les monarques qui avaient avancé les frais des expéditions lointaines. Et ensuite certains journaux furent diffusés dans le public et ceux-ci firent beaucoup pour la gloire du monarque commanditaire et pour les grands marins ayant parcouru les mers du globe.
Ne pouvant pas les nommer tous, nous avons toutefois choisi de citer :
 « le premier voyage autour du monde » réussi par une des nefs de Fernando de Magellan (1519-1521). C’est son fidèle compagnon Pigafetta qui a écrit cet ouvrage largement diffusé ensuite. Ce journal de bord annonce au monde occidental que ce tour de monde est réalisé pour la première fois et il confirme ce qui est connu depuis l’antiquité grecque : la terre est ronde.

« la description d’un voyage autour du monde » publié en 1771 reçut un succès considérable. Ce journal de bord raconte la circumnavigation à bord de la frégate « la Boudeuse » d’Antoine de la Pérouse un grand marin français.
« Seul autour du monde » publié en 1930 par le navigateur solitaire américain Joshua Slocum . Ce journal a marqué le monde de la navigation de plaisance.



Un bon dessin vaut mieux qu’un long discours.
A bord des vaisseaux d’exploration et de conquête du XII et XIIIème siècle, en plus de l’équipage courant et des soldats, une équipe de scientifiques et d’artistes embarquait . Ils étaient chargés de faire des découvertes et de rapporter les résultats de leurs travaux pour la gloire de leur pays.
Toutes les techniques graphiques connues à l’époque furent utilisées : croquis, dessins, peintures réalisés à la mine de plomb, en sanguine, aux trois crayons, à l’aquarelle, etc. D’ailleurs les officiers de marine eux même recevaient (et reçoivent encore aujourd’hui) un solide enseignement du dessin. Ainsi de splendides carnets de croquis furent créés et portés à l’admiration du public.
Nous pouvons évoquer par exemple :
« Le voyage en haute et basse Égypte » relaté par Vincent Denon au retour de la campagne d’Égypte de Bonaparte. Ouvrage qui participa à la mode de l’Orientalisme et influença le Style Empire.
« Le carnet de bord du navire anglais Beagle » et surtout la publication en 1838 par l’un des passagers d’une théorie novatrice étonnèrent le monde entier. Darwin y énonça sa fameuse Théorie de l’Évolution aujourd’hui enseignée par tous les savants.




Les voyages forment la jeunesse.
La jeunesse n’est pas qu’une question d’âge et un esprit curieux s’intéresse au monde extérieur à toutes les époque de son existence. Vous constatez avec nous que nous pouvons voyager sur terre, sur mer et même dans les airs, mais aussi en restant physiquement immobiles, par la seule force de notre esprit, de notre réflexion, par nos rêves et notre envie de découvrir d’autres mondes. Et pour cela, malgré les nouvelles techniques de communication, la lecture reste un moyen exceptionnel de dépaysement.



Journal de Paul-Émile Victor
Racontez vous, votre histoire.
Comme beaucoup d’entre nous, vous imaginez « quand je serai grand je ferai ceci ou cela, j’irai ici ou là-bas… ». Bravo, félicitations, alors permettez-nous une suggestion,: n’attendez pas et commencez dès maintenant votre journal de bord personnel. Il sera votre compagnon de route et vous lui confierez tout ce que vous souhaitez, à votre rythme. N’oubliez pas de l’illustrer de vos dessins, peintures, collages et autres trouvailles qui parleront pour vous. Plus tard, un jour peut être vous relirez votre ouvrage et alors vous voyagerez en remontant le temps…
Photos extraites du journal d’un amateur





Cette rubrique vous a intéressés, elle a éveillé le souhait de développer l'un des sujets abordés ou d’évoquer d’autres sujets liés à la mer, faites-le nous savoir par un message sur le blog ou par un courriel à 

A bientôt.
Ber et Ber